Les Jolies Colonies de Vacances

Pierre Perret cherche fortune, de rade en cabaret.

Erato

Hélas, sauf pour l’esprit, la valeur nutritive de la poésie est quasiment nulle.

Mais depuis « Le Tord-Boyaux », Pierre Perret creuse une veine bien plus rémunératrice, du côté de Hara-Kiri plus que de Georges Brassens.
Les paroles du Tord-Boyaux heurtent la bienséance et les bien séants, encore nombreux au milieu des années soixante.
Faut ce qu’il faut ! Pierre n’hésite pas à en remettre une couche avec « les jolies colonies de vacances »
Ton air est bon mais ton chant point
Tout public, mais truffé d’allusions graveleuses destinées à provoquer les foudres de la censure de l’ORTF.
Au prix où est la publicité, c’est du nanan.

Alors Pierre, les Colos, ça n’est pas un sujet trop risqué pour un chanteur engagé ?
En 66 on est trop petits pour se défendre, mais maintenant tu vas voir ta gueule…

Engagées jusqu’au trognon dans la gestion des colos, les associations laïques (mes chers frères) et confessionnelles (mes bien chers frères) montent au créneau,
avec l’énergie brouillonne propre aux militants véritables.

Leurs clameurs indignées dans les journaux et sur les ondes, assurent à la chanson de Pierre Perret une couverture médiatique franco-universelle.
Comme quoi nos chers frères ont beau connaitre les lois éternelles de l’Univers, ils ignorent entièrement celles du Marketing.

Pierre Perret et son Doudou
Après le matraquage de rigueur sur Europe 1 et France Inter, la chanson devient un vrai Tube en 1966.

Mais dis-moi Pierre, j’ai un doute.
Pour becqu’ter on nous met à l’aise,
C’est vraiment comme à la maison,
Les fayots c’est du vrai béton,
J’ai l’estomac comme une falaise.
L’matin on va faire les poubelles,
Les surveillants sont pas méchants…
Pour se baigner c’est l’coin tranquille,
On est les seuls personne y va.
On va s’tremper dans un p’tit bras,
Où sortent les égouts d’la ville.
Paraît qu’on a tous le typhus,
On a l’pétrus tout boutonneux !
Tu nous ballades des fayots aux poubelles, puis des égouts à l’abattage dans les bordels de Tanger.
Elle ne serait pas atrophiée du bulbe olfactif ta Muse ?
J’vous quitte là, j’vais voir ma fiancée,
Une vieille qu’a au moins ses dix berges,
Les p’tits on n’a vraiment pas d’chance,
On nous fait jamais voyager,
Mais les grandes filles vont à Tanger,
Dans l’autre colonie d’vacances…
Les beaufs de l’époque ont percuté au quart de tour, les bordels de Tanger ça leur parle !
Ils ne manquent pas une occasion de chanter le couplet sur notre passage.
Mais tu plaides le second degré, avec une hypocrisie non feinte (sic).
Soit, mais comme disent les parachutistes, le second degré ce n’est pas donné à tout le monde.
Mes copines ne veulent pas aller à Tanger, Pierre, alors vas-y toi-même,

Et surtout n’oublie pas ton tube.
Sans rancune, Pierre. Et avec le bon souvenir d’Estelle.